Roule ma frite donne une seconde vie aux huiles alimentaires - Premium

La recette ne date pas d'hier. La réutilisation de l'huile alimentaire, si elle se heurte à plusieurs freins notamment de développement technologique et d'intérêts divergents, permet de faire rouler des vieux diesel ou de générer de l'énergie. À Biarritz, tous les jeudis à 18 heures, l'antenne basque de ce réseau d'associations Roule ma frite collecte les huiles alimentaires de ses adhérents. Professionnels et particuliers peuvent déposer leur huile usagée dans le local de l'allée de Moura. Parmi les entreprises adhérentes, les restaurateurs sont l’une des professions les plus intéressées par ce système car ils sont contraints par la loi d'assurer la deuxième vie de ce déchet.La législation, en effet, impose à tout émetteur d'huile alimentaire usagée de plus de 60 litres par an d'en assurer le retraitement et de pouvoir justifier des modes d'élimination et de recyclage. Roule ma frite émet donc un contrat de collecte. « Les huiles subissent plusieurs traitements, détaille Hugues Coste, coordinateur de l'association à Biarritz. Elles sont décantées, filtrées plusieurs fois à un micron et redeviennent un produit utilisable. Nous transformons un déchet en une manne. » La vocation de Roule ma frite s'appuie sur deux axes : ôter toutes les impuretés de l'huile afin de lui conférer une valeur ajoutée et sensibiliser particuliers et professionnels à la possibilité d'utiliser un déchet comme une ressource.Carburant ou combustibleL'huile ainsi revalorisée peut être utilisée par les agriculteurs et les pêcheurs ou les professionnels dans leurs flottes captives, c'est-à-dire des véhicules appartenant à une entreprise ou une collectivité, qui s'approvisionnent en carburant à une même pompe dédiée. Que ce soit clair, Roule ma frite ne vend pas l'huile en tant que carburant, elle vend un produit qui peut servir à des usages divers. « Nos adhérents en font ce qu'ils veulent », précise Hugues Coste. Néanmoins, ceux qui peuvent l'utiliser comme carburant peuvent faire diminuer leur bilan carbone. Certains s'en servent comme combustible. Des groupes électrogènes fonctionnent à l'huile végétale. « En Allemagne, l'huile peut servir à produire de la chaleur ou de l'électricité, poursuit Hugues Coste. En gros, l'huile du kebab chauffe et éclaire la pièce ! »Roule ma frite se positionne sur l'économie circulaire et la diminution de consommation d'énergie. L'association ne cesse de sensibiliser sur les thèmes de la production responsable, écoconstruction, déchets, économie circulaire, recyclerie, ressourcerie, énergie. « On veut montrer que penser l'énergie en circuit court est possible, qu'il n'y a pas forcément besoin de gros budget pour diminuer son impact sur l'environnement. Le système de Roule ma frite n'engendre pas de gros bénéfices mais permet de ne pas gaspiller une ressource, c'est déjà beaucoup », estime Hugues Coste.En circuit courtL'association loue un local à la mairie de Biarritz depuis sept ans et bénéficie de quelques subventions de la communauté Pays basque. Elle pourfend l'image « des locaux qui nettoient leurs déchets dans leur coin ». Aujourd'hui, son système intéresse de plus en plus les entreprises puisque celles-ci doivent justifier d'actions concrètes pour diminuer leur impact environnemental, notamment leur impact carbone. Un autre atout dans la besace de Roule ma frite et des autres modèles similaires : la responsabilité territoriale de l'entreprise (RTE). Au vu de leurs interactions et interdépendances avec leurs territoires d’implantation, les entreprises représentent des acteurs cruciaux des écosystèmes locaux. Ainsi, la prise en compte par l’entreprise de son empreinte territoriale et son engagement territorial constituent des leviers d’un développement pérenne d’un territoire et de sa résilience. Récolter les huiles des entreprises du territoire pour les revaloriser sur ce même territoire représente l'essence même d'un circuit court.